Juge à la Cour supérieure du Québec depuis près de 15 ans, Carol Cohen, BCL’82, a entrepris de partager son expérience du droit et des tribunaux avec la Faculté, alors qu’elle passe une année en résidence à McGill.
Entrevue avec Victoria Leenders-Cheng, traduction et photos par Lysanne Larose
Madame Cohen, qui a reçu son diplôme de la Faculté en 1982 et qui a été nommée à la Cour supérieure du Québec en 1997, passe l’année universitaire en résidence à la Faculté et donne également un cours s’intitulant Anatomie d’un procès pour meurtre.
En tant que juge de la Cour supérieure du Québec présidant des procès avec jury, madame Cohen a entendu les mille et une raisons avancées par des jurés potentiels pour être exemptés de leur devoir. Récemment, elle lançait une discussion en classe sur la sélection d’un jury avec une cette observation: « Bien des avocats, même s’ils ne pratiquent pas le droit pénal, recevront ce coup de téléphone d’un client, d’un ami ou d’un membre de sa famille: ‘On me convoque comme juré. Comment je m’en sors?’ »
« J’ai entendu toutes les raisons imaginables pour lesquelles une personne ne peut pas siéger sur un jury, dit-elle, même si je recommandeà tous les jurés potentiels de bien réfléchir avant de demander une exemption. L’expérience d’un juré est unique et enrichissante et constitue une partie essentielle de notre système de justice pénale. Malgré tout, nous recevons une foule de demandes d’exemption et nous devons décider, en général en une minute ou deux, si les raisons invoquées sont acceptables. »
Voici quelques exemples: une mère célibataire qui travaille de 9 h à 17 h et dont les enfants sont en garderie. Un directeur d’école secondaire qui soutient que personne ne peut le remplacer dans ses tâches quotidiennes. Un homme qui déclare d’emblée qu’il a un préjugé à l’encontre des personnes ayant une certaine couleur de peau. Une femme qui affirme qu’elle ne peut pas être impartiale dans des cas d’accusations d’agression sexuelle.
Le but de cette première discussion en classe, selon madame Cohen, est de donner aux étudiants l’occasion d’évaluer ces raisons eux-mêmes et de plaider pour ou contre l’inclusion de ces candidats jurés.
La discussion a vite décollé et toutes sortes d’opinions ont fusé en classe quand Carol Cohen a expliqué la différence entre dispenser un candidat juré pour inconvénient personnel sérieux ou l’écarter suite à une récusation motivée ou pour cause.
« Dans un procès, surtout un procès avec jury, il y a beaucoup de pression pour en arriver à une solution rapide quand des questions ou des problèmes se présentent, » indique-t-elle, comparant l’expérience de présider un tribunal avec celle d’enseigner en classe. « Nous débattons ici les mêmes questions, mais en classe, nous avons le luxe de pouvoir en discuter à loisir. »
Bien que madame Cohen apprécie ce privilège de pouvoir allier des exemples concrets avec la jurisprudence pour alimenter les échanges en classe, elle est tout aussi rigoureuse avec ses étudiants qu’elle l’est lors d’un procès. Dans les deux cas, elle s’attend à ce que les gens s’expriment clairement quand ils ont la parole et s’abstiennent de bavarder à tout autre moment ou de manquer de respect envers les autres.
Elle exige également des arguments bien construits. Dans cette optique, elle a assigné des travaux basés sur des cas réels, mais structurés de sorte qu’il n’y ait pas de bonne ou mauvaise réponse : « Si quelqu’un fait valoir un point, que ce soit en cour ou dans la cadre d’une présentation orale en classe, je veux voir des recherches bien fouillées et la plus récente jurisprudence, mais je souhaite aussi qu’on mette de l’avant des positions claires, convaincantes et raisonnées. »
Au cours de son année à la Faculté, Carol Cohen a également assisté à un certain nombre de cours et a participé à de nombreux événements. Elle a donné une conférence organisée par le Caucus des étudiantes en droit de McGill sur l’histoire des femmes avocates et juges en l’honneur du 70e anniversaire de l’admission des femmes au Barreau. Elle a animé un débat sur la réforme constitutionnelle organisé par la Revue de droit de McGill. Elle a aussi travaillé avec les étudiants se préparant pour le concours Jessup et sera par ailleurs l’une des juges lors de la finale canadienne du concours en mars prochain.
Carol Cohen a récemment participé à une rencontre organisée par le Caucus des étudiantes, le Bureau de développement professionnel de la Faculté et le Comité des avocates dans la profession du Barreau de Montréal. L’événement a donné à des étudiantes et étudiants la chance de rencontrer des femmes poursuivant des carrières juridiques. Pour madame Cohen, ces occasions de mentorat sont particulièrement gratifiantes.
« Depuis ma nomination à la Cour supérieure, j’ai saisi toutes les occasions d’aller parler à des étudiants de tout âge. Ça peut sembler banal, mais ça m’importe beaucoup, » dit-elle, faisant le lien entre ses expériences passées et son mentorat actuel à la Faculté.
« Les quatre femmes admises au Barreau en 1942 étaient des pionnières et je ne serais pas où j’en suis aujourd’hui sans elles. Il est important de se rappeler ces pionnières et de les honorer en encourageant d’autres étudiants et avocats, hommes et femmes, en paroles et en actes, et leur démontrer que tout est possible. »
Justice Stephen Goudge of the Court of Appeal of Ontario will speak to students and Faculty members about his Commission report on pediatric forensic pathology on Tuesday, March 6 at 4 p.m in rooms 312-316 (New Chancellor Day Hall). Past guest speakers for Cohen’s class have included Justice Marc David of the Superior Court of Quebec, on the Turcotte trial and expert evidence, and Justice Allan Hilton, of the Quebec Court of Appeal, on the language of the trial.