Détail du poster de la Semaine de la propriété intellectuelle

La semaine de PI à la Faculté de droit a donné aux étudiants, professeurs et praticiens une occasion unique de sonder d’un peu plus près les méandres de la propriété intellectuelle

Imaginez : une exposition sur corde à linge où s’offrent aux passants des pages de l’œuvre de Camus. Une boîte de dons qui vous invite à payer ce que vous voulez pour un disque CD de Misteur Valaire, un groupe musical en vogue à Montréal. Des débats sur les whiskeys de renom et les chocolats de luxe, sur la pauvreté et le privilège, et aussi sur le Père Noël.

Et tout ceci est relié à la propriété intellectuelle.

Combien payeriez-vous pour la culture?

Voilà comment s’est déroulée la Semaine de la propriété intellectuelle : un enchaînement d’expositions hautes en couleur et de débats intellectuels sur la façon dont le droit s’applique aux œuvres de l’esprit.

Cette manifestation, organisée par le Centre des politiques en propriété intellectuelle en septembre 2011, a rassemblé des juristes et des praticiens de partout, y compris des conférenciers venus des universités de Cambridge et de Yale.

Ils se sont attaqués à des questions épineuses entourant le domaine public en utilisant l’exemple de l’œuvre d’Albert Camus, tombée dans le domaine public au Canada, mais encore protégée par le droit d’auteur en France. Ils se sont demandé si les mécanismes de la propriété intellectuelle sont utilisées de manière excessive pour protéger le terroir et la marque de commerce de produits de luxe, tels que le whiskey, le chocolat or le fromage. Et pendant toute la semaine, les participants se sont fait offrir des exemplaires d’un CD inédit de Misteur Valaire, qu’ils étaient libres de payer ou non. Qu’auriez-vous fait à leur places?

Justement, et peut-être pour répondre à cette question, la semaine s’est achevée par un panel avec un invité spécial : Guillaume Déziel, le gérant de Misteur Valaire, qui est venu parler du cheminement vers le succès de cet ensemble électro-jazz.

Le groupe a d’abord connu des années difficiles. Lancé en 2005, leur premier album, vendu à 300 exemplaires seulement, est « un flop total » selon Guillaume Déziel. Mais, l’ensemble commence ensuite à être populaire et connaît plusieurs succès, y compris deux spectacles à guichets fermés au Métropolis à la fin de 2010 et un concert spécial au Festival international de jazz de Montréal l’été dernier.

Guillaume Déziel, le gérant de Misteur Valaire, parlant de l'approche de commercialisation novatrice du groupe

Décrit comme un pionnier de la scène musicale québécoise indépendante pour son approche unique au marketing de la musique, Guillaume Déziel a clos les discussions de la semaine par un mélange intéressant de théorie et de connaissances pratiques de l’industrie musicale.

La stratégie commerciale de Misteur Valaire commence par la vente de ses œuvres musicales selon une approche «payez ce que vous voulez » qui a été popularisée par Radiohead en 2007, a-t-il expliqué. « On a renoncé à court terme aux revenus de ventes et on est plutôt allé chercher des milliers d’agents de promotion… et on a découvert que le meilleur moyen de répandre la bonne nouvelle est de permettre aux autres de le faire et éventuellement de monnayer cette relation-là. »

Monsieur Déziel a ajouté que la majorité des revenus du groupe ne provient ni des ventes de disques CD, qui représentent moins de la moitié des ventes totales,  ni des ventes numériques, qui continuent à s’effecteur selon le modèle du payez-combien-vous-voulez’, mais est plutôt générée par la vente de billets de spectacle, où ont afflué 4600 personnes au Métropolis l’an dernier.

« La vente de disques depuis 2005 ressemble à une descente en luge et plus ça descend, plus ça va vite » dit-il, décrivant la chute vertigineuse des ventes de disques CD depuis l’avènement des pistes MP3. Selon lui, la musique gratuite permet de donner rapidement de la valeur à l’image du groupe et, en conséquence, fait mieux vendre ses produits dérivés. « La musique enregistrée est un produit d’appel pour vendre d’autres produits ou services sur lesquels il existe encore des moyens de contrôle réels. »

« On peut dire, ‘Stop la vague,’ ou on peut prendre la planche et descendre; on peut utiliser cette force-là pour faire autre chose, pour le plaisir. »